En Éthiopie, l’ensete, plante proche de la banane considérée comme la base de l’alimentation locale, est ravagée par le flétrissement bactérien. Un temps boudée par les scientifiques, la recherche pour sauver la plante commence à prendre de l’ampleur.
Les fausses bananes, ensetes de leur vrai nom, sont le symbole de la « sécurité alimentaire » en Ethiopie. La plante fait partie des aliments les plus consommés par les habitants depuis des générations. Seulement depuis trente ans le Xanthomonas, une bactérie, fait pourrir les feuilles des plantations. Une étude menée par deux scientifiques éthiopiens démontre qu’il est possible d’endiguer l’épidémie.
Jusque là, l’une des solutions les plus efficaces consistait à traiter les surgeons de plants infectés. Le surgeon étant une pousse naissant à la base d’une racine. Grâce à ce traitement, on peut faire pousser des ensetes sains provenant de plants malades. Le procédé existait déjà, mais Genene Gezahegn, de l’université de Gonder, et Firew Mekbib, de l’université d’Haramaya, toutes deux en Éthiopie, se sont appuyés sur plusieurs études, et notamment l’une réalisée à l’université de Kagoshima, au Japon, pour exécuter le traitement in vitro.
Des hormones végétales comme médicaments
Deux hormones végétales ont été injectées aux surgeons : le benzyl adenine (BAP) et le naphtalène acétique (ANA). Ces molécules avaient déjà été utilisées pour soigner les bananiers de plusieurs maladie. Les résultats de l’expérience montrent que les plantes traitées ne présentent plus aucun symptôme de flétrissement. Une fois sortis des incubateurs, 50 à 60 % des plants soignés arrivent à s’épanouir au-delà de quinze jours en sol non stérilisé. Et jusqu’à 90 % pour les sols stérilisés.
« Le procédé n’est pas totalement nouveau, explique Emmanuel Wicker, biologiste au Centre de coopération International en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), Il est utilisé pour soigner les bananiers, en Afrique et en Amérique du Sud. En ce qui concerne l’ensete, là c’est relativement innovant »
Au secours des petits cultivateurs
L’ensete est produit exclusivement par des petits fermiers et non pas pour de la culture de masse. Donc, sans aucune aide, l’accès aux différents traitements n’est pas évident et la méthode la plus utilisée reste l’abattage des plants malades. Mais étant donné que l’ensete met 8 ans pour arriver à maturité, une culture malade entraine une lourde perte économique étalée sur plusieurs années.
Cette étude pourrait donc être utilisée par l’Institut International d’Agriculture Tropical (IITA), qui a lancé il y a trois ans un vaste projet pour sauver l’ensete. Un vrai devoir pour Emmanuel Wicker : « Il faut que le gouvernement, ou des associations d’exploitants se mobilisent pour aider à stopper l’épidémie », et donc sauver ce qui est désormais plus qu’une tradition éthiopienne.
Référence : G. Gezahegn et F. Mekbib, African Journal of Biotechnology, 15, 2192, 2016.