Chaque année, plus de 91 millions de personnes en Afrique tombent malades à cause de ce qu'elles ont mangé. L'aquaculture fait partie du problème.
Nous devons mieux comprendre les diverses façons dont les humains et les animaux sont exposés aux antibiotiques, et l'accroissement de la présence dans les aliments de bactéries résistantes aux médicaments. La recherche sur ces bactéries résistantes aux antibiotiques qui se trouvent de plus en plus fréquemment, et en quantités de plus en plus grandes, dans les aliments est en plein développement.
C'est un sujet important parce que la présence de ces bactéries dans l'environnement constitue une menace pour la santé publique mondiale, la sécurité alimentaire et la santé humaine.
Mes recherches se sont concentrées sur l'occurrence et la prévalence croissantes de ces bactéries. Par exemple, dans un article publié il y a trois ans, j'ai entrepris de trouver des solutions au fardeau croissant des maladies d'origine alimentaire. Je me suis concentré sur les pays en développement. Chaque année, plus de 91 millions de personnes en Afrique contractent une maladie à cause d'une contamination alimentaire.
L'étendue des maladies découlant de la consommation de produits de la mer contaminés a donné lieu à d'autres recherches.
Mes collègues et moi avons cherché des réponses à des questions sur la salubrité, la qualité et la détérioration des produits de la mer. Dans une étude dont j'ai été coauteur, nous avons observé la prévalence de bactéries résistantes aux antibiotiques dans les échantillons de produits de la mer, d'eau de mer et de sédiments. Nos résultats ont révélé un danger pour la santé publique, en particulier pour ceux qui vivent à proximité du milieu marin et dont les moyens d'existence dépendent de l'aquaculture.
Au commencement
L'utilisation des antibiotiques remonte à plusieurs siècles, mais elle n'a pris de l'importance qu'à partir de 1928, lorsque le scientifique Alexander Fleming a découvert la pénicilline, connue comme le premier « antibiotique » (« contre la vie »).
C'est Selman Waksman, microbiologiste, qui aurait utilisé le premier le mot "antibiotique" en 1941. Il l'a employé pour désigner les substances produites par un micro-organisme qui peuvent arrêter la croissance d'autres micro-organismes.
En raison de l'efficacité du premier antibiotique dans le traitement des infections, la classification et la commercialisation des antibiotiques se sont développées entre 1940 et 1961.
Au début, les antibiotiques étaient efficaces contre un large éventail de microorganismes pathogènes. Mais à mesure que le développement humain et la mondialisation s'intensifiaient, l'abus de ces « produits magiques » s'est intensifié.
À lire : Antibiotics: interplay between humans, animals and the environment is key
Il en est résulté des micro-organismes résistants aux antibiotiques. Les bactéries résistantes aux antibiotiques contenues dans les produits de la mer en sont un exemple.
Produits de la mer
L'augmentation de la population mondiale sa eu pour conséquence une augmentation de la demande d'aliments durables. La production de poissons, de crustacés et de coquillages par l'aquaculture a été identifiée comme une source durable d'aliments pouvant fournir les nutriments et les minéraux nécessaires à une croissance saine.
Mais pour éviter la mortalité des animaux qu'ils élèvent et augmenter la valeur économique de leurs productions, les aquaculteurs utilisent généralement des antibiotiques. Il en est résulté une augmentation de la présence de la résistance aux antibiotiques dans les produits de la mer.
Cela a conduit les scientifiques à se poser diverses questions sur la salubrité des produits de la mer. Celles-ci incluent :
- quels sont les différents types de bactéries présentes dans les produits de la mer crus, transformés et cuits ?
- Sont-elles résistantes aux antibiotiques ?
- Si elles sont résistantes, à quel type d'antibiotiques ?
- Existe-t-il des liens entre les bactéries présentes dans les produits de la mer crus et transformés et les gènes responsables de ces résistances ?
Répondre à ces questions aidera à sauver les humains et les animaux des bactéries résistantes aux antibiotiques qui pourraient causer des maladies mortelles.
J'ai développé un grand intérêt pour les produits de la mer en tant que source de revenus et de nourriture. J'ai mené une série de recherches pour trouver des réponses. En particulier :
- avec des collègues, nous avons mené des recherches sur la présence de la bactérie Aeromonas hydrophila dans des produits de la mer, de l'eau de mer et des sédiments. La bactérie pourrait causer des maladies mortelles, en particulier chez les personnes immunodéprimées, et peut tuer des animaux marins. Ce qui est particulièrement troublant, c'est que nous avons constaté que la bactérie était résistante à toute une gamme d'antibiotiques. Notamment à la vancomycine, à la novobiocine, à la streptomycine et à la gentamycine.
- Nous avons également étudié d'autres bactéries résistantes aux antibiotiques telles que Vibrio dans l'eau de mer et les sédiments. La bactérie peut causer une gastro-entérite chez les personnes qui consomment des produits de la mer contaminés par cette bactérie. Nous avons constaté que les bactéries pathogènes étaient présentes à la fois dans les animaux et dans le milieu marin. La bactérie était résistante aux antibiotiques.
- Nous avons également examiné les études antérieures d'autres scientifiques sur divers aliments d'origine marine, afin de connaître le type de bactéries résistantes aux antibiotiques qui étaient présentes et le type d'antibiotiques auxquels elles étaient résistantes. Nous avons observé la présence de bactéries résistantes aux antibiotiques dans les clams, les huîtres, les moules, les crevettes et les poissons.
La voie à suivre
Des efforts et des approches concertés sont nécessaires pour faire face à la menace pour la santé publique mondiale posée par la présence dans l'environnement de bactéries résistantes aux antibiotiques véhiculées par les produits de la mer. Cela doit impliquer les gouvernements, les scientifiques, les individus et les agences.
À lire : The world needs 'antibiotic guardians' to safeguard their future use
Il serait utile de lancer des programmes d'éducation et de de sensibilisation pour les aquaculteurs, afin qu'ils comprennent l'impact négatif de l'utilisation des antibiotiques. Cela pourrait contribuer à réduire l'utilisation d'antibiotiques en aquaculture et à prévenir l'augmentation des bactéries résistantes aux antibiotiques présentes dans les produits de la mer.
Olumide A Odeyemi, Université de Tasmanie
Cet article a d'abord été publié dans The Conversation sous licence Creative Commons. Il a été traduit en français par Afriscitech. Lisez l'article original.