Retourner travailler en Afrique et éviter l'isolement : des réseaux rassemblant des scientifiques africains seraient-ils l'une des solutions?
Mohamed Benguerna, Centre de recherche en Economie Appliquée pour le Développement, Alger, Algérie
C’est une question primordiale, même cruciale. On est parti de l’observation que les chercheurs africains de manière générale sont actifs dans pas mal de réseaux de recherche scientifique et professionnels mais souvent ce sont des réseaux de recherche qui appartiennent à des pays du nord.
Emmanuel Kamdem, université de Douala, Cameroun
Le constat fait est que la collaboration scientifique est plus forte entre les chercheurs africains et les chercheurs des pays occidentaux, entre le sud et le nord.
Nathalie Persson, Fondation internationale pour la science, Suède
Comme en Afrique on est surtout habitué à voir la collaboration verticale, je pense qu’on gagnerait plus à apprendre aussi à ces jeunes, parce que c’est une question d’attitude aussi, il faudrait qu’ils aprennent à collaborer en réseau. Et c’est pour ça que c’est très iportant justement que on s’allie avec d’autres chercheurs qui s’intéressent à ce même genre de problèmes. On a beaucoup plus de chances d’ouvrir ses perspectives, sa compréhension du problème. On ne peut pas travailler en silos.
Emmanuel Kamdem
Aujourd’hui, faire de la recherche, qu’ele soit scientifique, fondamentale, appliquée, c’est être capable de lire et de s’exprimer en anglais par exemple. L’idée est donc de parvenir à briser ces frontières et faire en sorte que par exemple des chercheurs francophones soient mieux inspirés par les productions scientifiques des chercheurs anglophones, et vice-versa.
Mohamed Benguerna
D’abord il y a un problème de communication et d’information. Deuxièmement je pense aussi c’est un problème culturel. Il y a des comportements qui reviennent souvent où le chercheur africain de manière générale cherche un ancrage dans un centre de recherche ou une institution européenne ou anglo-saxonne.
Emmanuel Kamdem
Il y a aussi une autre difficulté qui est celle de la mobilité. C’est-à-dire du déplacement au niveau du continent. Vous vous rendez-compte par exemple qu’il est pour un chercheur africain beaucoup plus facile de voyager de Douala à Paris que de voyager de Douala à Nairobi, ou de Douala à Johannesbourg.
Mohamed Benguerna
La première priorité, c’est de cibler ce type de réseau. C’est-à-dire par rapport à tout ce qui existe comme problèmes, cibler les personnes et les faire travailler ensemble.
Emmanuel Kamdem
Alors développer un réseau, j’aurais envie de dire : « il faut des ressources ». Il faut des ressources humaines. Des chercheurs compétents, qui aiment leur travail, qui sont véritablement engagés dans la voie d’une recherche africaine. Bien évidemment, la question qui revient à tout moment, est celle des ressources financières. Il est plus facile d’obtenir un financement quand on est ensemble, quand on présente des projets qui ne se déroulent pas dans un seul pays, mais qui se déroulent dans plusieurs, pays, mettant donc en commun des chercheurs africains de différents pays et de différentes nationalités.
Propos recueillis par Jean-François Haït