Qui êtes-vous ?
Je m’appelle Michèle Mbo’o Tchouawou. Je suis camerounaise. Je suis chercheuse en économie du développement. Je vis à Nairobi au Kenya où je travaille au Centre de recherches international sur l’agroforesterie, l’ICRAF, dans le cadre du programme AWARD qui signifie African Women in Agricultural Research and Development.
C’est quoi le One Planet Fellowship ?
Pour parler du One Planet Fellowship Programme, il faut peut-être remonter à AWARD. Parce que le programme est en fait une réplication du modèle de fellowship d’AWARD. Donc l’idée est vraiment de pouvoir montrer au monde que l’on a du potentiel et que nous devons valoriser ce potentiel partout où il se trouve. Mais aussi de donner à ces femmes chercheurs la confiance en elles-mêmes, la possibilité d’influencer nos systèmes politiques, la possibilité d’influencer les preuves dont les politiques publiques ont besoin pour pouvoir mettre en place des politiques qui répondent aux besoins de nos populations. Parce que finalement, on fait de la recherche pour qu’elle soit au service des populations.
Sur quel modèle vous appuyez-vous ?
Le One Planet Fellowship s’appuie sur le modèle d’AWARD qui met au centre des chercheurs de différents pays africains mais aussi des chercheurs européens, des superviseurs dans des centres de laboratoires à travers le monde. En particulier en Europe et en Afrique. Mais aussi des jeunes chercheurs qui seront associés à des lauréats dans le cadre de ces programmes là. Donc nous visons envion 600 chercheurs qui seront sélectionnés dans le cadre de ce programme. Mais l’idée est qu’au bout de cinq années, on puisse, au-delà des 600 chercheurs qui seront au centre, créer des interactions de plus de 1 000, 2 000, 3 000 chercheurs à travers le monde. Donc c’est vraiment un programme qui, au-delà de mettre au centre des chercheurs, qui vont bénéficier de certaines opportunités, va aussi promouvoir, mobiliser les collaborations entre les chercheurs africains, mais aussi les chercheurs européens. Et l’idée est de répliquer le modèle, pourquoi pas, en Asie, en Australie et dans d’autres contrées.
Votre avis sur les jeunes chercheurs qui ne retournent pas en Afrique après leurs études ?
Déjà je dirais que ce n’est pas un problème en tant que tel parce que l’on se sent bien là où on est. Mais ça c’est une chose. Maintenant, de mon expérience, je dirais qu’il faut oser parce qu’il y a beaucoup de potentialités en Afrique, il y a beaucoup d’opportunités en Afrique, et c’est un terrain qui est encore assez vierge où chacun de nous, en tant que chercheur, nous pouvons avoir notre impact. Donc moi je dis à nos frères et sœurs qui font la recherche qu’il y a des défis à relever, on ne doit pas l’oublier. Mais il faut oser, il faut se dire qu’il y a des possibilités de faire des choses. Et il ne faut pas regarder seulement l’impact qu’on va faire au Cameroun. S’il se trouve qu’on se retrouve au Mali et qu’on peut avoir un impact qui peut être généralisé au Cameroun, pourquoi pas. Qu’on se retrouve en Namibie, qu’on se retrouve en Afrique du Sud ou n’importe où en Afrique, du moment où on travaille ensemble pour développer notre continent, je pense que c’est un effort que nous devons faire. J’ai vécu en France un peu plus d’une dizaine d’années. J’ai osé. Le jour où j’ai osé, je suis partie et je pense que je ne regrette pas du tout.
Propos recueillis par Jean-Bruno Tagne